Les effets négatifs de la technologie sur la société

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Les effets négatifs de la technologie sur la société
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Aujourd’hui je vais partager pas mal d’idées mises en avant par Salim Ismail, un entrepreneur canadien et stratégiste technologique (oui oui ça existe). Je suis tombé sur certaines de ses conférences et j’ai trouvé qu’il met le doigt sur des éléments de réflexion intéressants vis-à-vis de l’évolution technologique.

Au 15e siècle, nous avons vécu la révolution de l’imprimerie. Et ça a drastiquement changé le monde. Aujourd’hui, nous sommes en train d’être percuté en pleine face par 20 révolutions de l’imprimerie ! une vingtaine de révolutions ayant le potentiel de changer le monde autant que l’imprimerie a changé le 15e siècle. Si ce n’est plus.

Si on prend juste les voitures autonomes. Bam ! grosse révolution. Rien que ça hein, ça suffit à drastiquement changer le monde !

Mais on ajoute le blockchain. Bam ! Le solaire. Bam ! L’intelligence artificielle. Bam ! L’informatique quantique. Bam. Crispr. Bam ! la robotique. Bam ! la réalité virtuelle. Bam!

Nous n’avons jamais vu ça dans l’histoire de l’humanité. On est vraiment en train de connaître une série de technologies qui sont en croissance exponentielle.

Au cours des siècles précédents, on avait généralement une grosse révolution technologique qui permettait d’en accélérer d’autres. L’imprimerie a bien mis 100 ans avant d’être totalement absorbé par les sociétés de l’époque. Avant que les différentes institutions comprennent l’ampleur du bouleversement engendré par les machines à imprimer, et finissent par se moderniser.

Les avancées technologiques d’aujourd’hui sont en train de casser toutes les institutions. Tous les mécanismes qui nous servent à faire fonctionner une société moderne sont en train de plier jusqu’à peut être la rupture. Le système politique, juridique, l’éducation, la sécurité sociale et la santé ont tous un point commun : ils ont été conçus pour faire fonctionner une société appartenant au 20e siècle.

L’éducation est un bon exemple. Tous les systèmes éducatifs de la planète sont basés sur le schéma : on prend des jeunes enfants, on les forme jusqu’au début de la vingtaine afin qu’ils soient prêts pour exercer un métier existant sur le marché du travail. Et pendant des générations, ça marchait très bien puisqu’on savait que les métiers et les techniques n’allaient pas trop changer d’ici à ce que les enfants soient en âge de travailler.

Cool, sauf qu’on peut plus faire ça ! On n’a aucune idée à quoi ressemblera le marché du travail en 2040-2050. Les métiers existant sur le marché du travail ne seront plus dispo quand les enfants auront l’âge d’exercer ces métiers. Du coup, qu’est ce qu’on leur enseigne ?

Et même à l’université, dans certains secteurs, le rythme du changement est beaucoup plus rapide que ça. Un étudiant peut commencer son master et lorsqu’il l’obtient 5 ans plus tard, il est déjà à la page. Et ça m’est arrivé finalement. J’ai fait un DUT dans le multimédia et entre autres j’ai appris à concevoir des sites internet, dans différent langage informatique. Aujourd’hui, les sites internet ne se font plus du tout de la même manière et mes compétences sont finalement presque inutiles. Et même une année après l’obtention de mon diplôme il y avait déjà des nouvelles techniques. Le monde ne changeait pas aussi vite il y a quelques générations. Le problème il est structurel au final. Les programmes ne s’adaptent pas suffisamment au cours de la formation des étudiants. Certaines écoles gardent les mêmes livres pendant des décennies !

Autre exemple avec le mariage. Une des plus vieilles institutions qui structure une société. Apparemment le mariage date d’au moins les premières civilisations mésopotamiennes il y a 5000 ans. Une époque où l’espérance de vie était de 30 ans. Donc au final, vivre avec la même personne toute sa vie c’était plus facile qu’aujourd’hui ! Juste 10-15 ans ! Pas étonnant que le nombre de mariages a explosé avec l’augmentation de l’espérance de vie. Mais demain, avec l’évolution de la médecine et les possibilités de peut être de doubler l’espérance de vie, est-ce que l’institution du mariage fera encore sens ? Est-ce qu’on doit s’attendre à ce qu’un couple vive ensemble pendant 150 ans ? L’institution du mariage et de la famille par la même occasion, va devoir accepter de changer de forme.

On voit bien que nos institutions souffrent d’un stresse causé par les disruptions technologiques. Et ce n’est pas nouveau puisqu’une des plus anciennes institutions a connu de nombreuses cassures au cours des siècles. Il s’agit de la religion. Chaque mouvement scientifique a entraîné une réaction hostile des religions. C’est logique puisque les différentes visions de l’univers décrit dans les livres saints sont entrées en conflit avec les nouvelles théories scientifiques. Et même avec les nouvelles technologies. On pense à l’avortement, la contraception, etc. Et aujourd’hui, on constate une recrudescence des mouvements fondamentalistes religieux qui incitent à revenir à un temps passé, style Moyen-Âge où la religion était omniprésente et respectée à la lettre de manière orthodoxe, tel qu’il était marqué dans les livres saints. Pourquoi ? Bien, car leaders orthodoxes sont en train de flipper face au rythme du changement. Ils savent très bien que si ça continue, le scénario le plus probable ce n’est pas un futur où leur vision du monde sera majoritaire. Ils font plutôt face à la disparition de l’approche orthodoxe des religions. C’est-à-dire une lecture la plus conforme possible aux textes sacrés. Je veux dire par là qu’il y a 500 ans, être chrétien c’était être convaincu que l’humanité avait pour origine Adam et Ève. Aujourd’hui, la majorité des chrétiens se disent que cette histoire d’Adam et Ève c’est une sorte de métaphore et pas vraiment un évènement historique.

Au niveau politique et gouvernemental, on n’en parle même pas ! La démocratie représentative a été inventée lorsque les moyens de communication étaient très limités. Transporter l’information le plus vite possible c’était envoyer une lettre à cheval, et il n’était pas possible de couvrir de grande distance. Du coup, impossible de savoir ce qu’il se passe à l’autre bout du pays avant quelques jours. En plus, le taux d’illettrisme était énorme. Donc logiquement il y avait des représentants qui étaient chargés de transporter les nouvelles au gouvernement et de partager les avis des personnes de la province dont ils étaient en charge. Aujourd’hui, l’information circule instantanément aux 4 coins du monde. On peut savoir en direct ce qui se passe dans un petit village au Pérou. Le résultat, on peut le voir dans toutes les démocraties sur la planète. Elles sont cassées. On ne fait plus confiance à nos représentants et peut être qu’une solution serait de se diriger vers une démocratie directe.

Il y a la nécessité d’une mise à jour dans le système démocratique, et au final, de mettre à jour toutes les institutions. On a besoin d’un patch 21e siècle !

Le problème, c’est qu’il y a souvent une réaction hostile lorsque l’on essaye d’introduire de nouvelles idées et d’intégrer les technologies disruptives dans les systèmes en place. Une sorte de réaction immunitaire où les anticorps attaquent les nouvelles propositions de mise à jour. Lorsqu’on essaye de mettre à jour l’éducation, les syndicats des professeurs deviennent fous où alors les étudiants bloquent les écoles.

On essaye de mettre à jour le transport, on a des grèves. Ou alors la lutte entre les chauffeurs de Taxi et Uber. Et demain, on aura la lutte entre les chauffeurs Uber, et les voitures autonomes. On sait d’avance qui va gagner !

On va essayer d’introduire la viande in vitro et forcément tout le secteur de l’industrie fermière qui va s’y opposer.

Donc un vrai défi du 21e siècle c’est de moderniser les institutions au même rythme que le progrès technologique et social. Car toutes ces innovations sont fascinantes et il y a de quoi être excité par le futur. Au final, la technologie est probablement le facteur majeur permettant le progrès. On ne va pas faire la liste de tous les exemples, mais si on prend juste l’abolition de l’esclavage. Assurément, c’est un progrès social. On ne va pas dire le contraire. Aux États-Unis, qui étaient un centre majeur de l’esclavage sur la planète, l’abolition est venue des États du Nord qui étaient, comme par hasard, les plus industrialisés. Toutes les technologies des révolutions industrielles ont permis de créer des usines et un avantage économique majeur. Pour eux, l’esclavage n’avait plus vraiment de sens. Par contre le Sud était moins chanceux et ne voulait donc pas se priver d’une main-d’oeuvre gratuite. Résultat, guerre de Sécession et tout le tralalala.

Si vous êtes un habitué de la chaîne, vous savez que je suis un optimiste en ce qui concerne le futur. Par contre, je suis moins optimiste en ce qui concerne la capacité qu’ont les institutions à changer. À se mettre à jour rapidement. Et ça va inévitablement poser des problèmes. L’imprimerie a bien mis 100 ans avant d’être totalement absorbé par les sociétés de l’époque en modernisant les institutions. Mais on ne pourra se permettre d’absorber les 20 révolutions équivalentes à celle de l’imprimerie qui sont en cours dans un même laps de temps.

Les technologies disruptives ont cette tendance à ajouter une sorte de stresse sur des entreprises, des institutions et même les individus. Car il faut être capable de s’adapter. De faire preuve de flexibilité. Lorsqu’un objet n’est pas flexible, que se passe-t-il lorsqu’on lui ajoute du stresse ou de la tension ? Il se plie et finit par casser.

Le monde est basé sur des organisations centralisées depuis des siècles. La hiérarchie des entreprises, des religions judéo-chrétiennes, les complexes militaro-industriels. Mais avec l’émergence d’internet, le blockchain, les cryptomonnaies, le mouvement open source, le crowdsourcing, on se dirige vers une décentralisation du monde. Et cette transition est également vecteur de stresse. On peut aussi citer d’autre tension comment le physique contre le numérique ou le réel contre le virtuel.

Toutes les entreprises qui ont été conçues pour réussir au 20e siècle sont vouées à l’échec au 21e siècle. Cette phrase de l’économiste David Rose est exagérément dramatique, mais révèle quand même une certaine vérité.

Et on le voit depuis le passage dans l’ère du numérique et du virtuel, de plus en plus de domaines se dématérialisent, et se numérise. Par exemple, vous avez déjà entendu parler de Kodak. Une des entreprises les plus connues dans le monde de la photographie. En 1975, Steven Sasson, un ingénieur chez Kodak invente le premier appareil photo numérique au monde. Il va dans le bureau du big boss de Kodak et dit : Voilà le futur de la photographie Monsieur. On devrait s’y pencher dès maintenant. Le patron rigole et lui dit que c’est un jouet pour les gosses et que Kodak fait des appareils photo argentiques pour les professionnels. En gros, le numérique n’a pas d’avenir ! En 1996, Kodak était évalué à 28 milliards sur le marché économique avec 140 000 employés. En 2012, l’entreprise a fait faillite en grande partie à cause de l’explosion des appareils photo numériques. Une technologie qu’ils ont inventée. Cette même année 2012, Instagram qui possédait 13 employés se fait racheter par Facebook pour 1 milliard de $.

Ce que Kodak n’a pas compris en 1975, c’est qu’ils n’ont jamais été une entreprise d’argentique. Ils étaient une entreprise de photographie. C’est ça au final le coeur de ce qu’ils faisaient. Ils auraient dû donc évoluer avec la technologie.

Netflix a fait l’inverse de Kodak. Fondée en 1997, l’entreprise californienne était à l’origine un catalogue de film DVD sur commande que l’on recevait par voie postale. Mais ils ne se sont jamais dit que le coeur de ce qu’ils faisaient, c’était des DVD. Ils ont compris que Netflix était avant tout un service proposant des films à des utilisateurs. L’envoi postal de DVD n’était qu’un outil. Donc ça n’a pas été un problème pour eux d’embrasser complètement le streaming et la VOD lorsque cette technologie explosa, avec l’émergence de YouTube et autres. Et c’est marrant de voir la concurrence. Car pendant longtemps, le plus gros concurrent de Netflix c’était blockbuster, en tous cas aux États unis. Blockbuster était une chaine de vidéo club en faite pour louer des films. En 2008, le patron de Blockbuster déclara que Netflix n’était même pas sur le radar en termes de compétition. En 2010, ils faisaient faillite.

Donc voilà, on a tout un tas de technologie disruptive qui va bouleverser presque tous les secteurs économiques, et également les institutions qui n’ont tout simplement pas été conçues pour intégrer le monde du 21e siècle. Les choses avancent finalement plus vite que nous avons la capacité de les digérer. Maintenant, cette affirmation est vraie uniquement pour les anciennes générations. Car les nouvelles sont nées avec cette accélération du changement. Pour eux, c’est tout à fait normal de devoir s’adapter tous les 2 ans à de nouvelles choses. Quand je parle d’anciennes générations, je me considère dedans, car je fais partie de la génération Y. Mais j’insiste plus particulièrement sur la génération baby-boomer et génération X. Pour faire simple, les gens qui ont plus de 50 ans aujourd’hui. Alors je vois tout de suite les commentaires que je vais recevoir en disant ça ! “tout ça, c’est des conneries, je suis un baby-boomer et je suis très a l’aise avec les nouvelles technologies”. Oui et heureusement que tout le monde n’est pas largué. Mais il faut quand même avouer que c’est l’exception. On voit plus souvent des petits enfants expliquer à leurs grands-parents comment fonctionne un ordi ou un smartphone plutôt que l’inverse. Un enfant de 2 ans aujourd’hui utilise presque intuitivement une tablette pour jouer ou regarder des dessins animés.

Et il se trouve qu’il y a beaucoup de génération Baby-boomer ou génération X qui sont à la tête des décisions prises par les institutions. Au niveau des institutions religieuses, la moyenne d’âge est bien ancrée dans la case senior. Les juges, les CEO des grands groupes, les ministres et parlementaires, pareil. Encore une fois il y a des exceptions. Mais sans faire de généralité, on a quand même de nombreux leaders qui ont une vision 20e siècle du monde ce qui fait qu’il n’intègre pas facilement l’accélération du changement et donc le stress sur les institutions s’accentue. Et un autre facteur qui n’arrange pas la flexibilité c’est que moderniser des infrastructures et organisations, cela peut prendre du temps et coûter beaucoup d’argent. Par exemple, au cours des années 70-80, l’informatique s’est affirmée à juste raison comme une solution d’avenir, mais il a fallu des décennies avant de voir une adoption massive au sein des institutions. Ensuite c’est internet qui est arrivé et rebelote. Puis les applications mobiles. Donc en gros, dès qu’on finit de moderniser un environnement, il faut le refaire.

Ce sera intéressant de voir ce qu’il se passera lorsque les nouvelles générations seront à leur tour à la tête des institutions dans 20 à 50 ans. Est-ce qu’il y aura plus de souplesse ? En attendant, il faut s’attendre à voir de nombreuses institutions se briser au fil des prochaines décennies. Et de nouvelle méthode et nouvelles idées émergeront pour moderniser tout ça. Car on a vraiment besoin d’un patch 21e siècle.

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