Morphée et moi

Tout public Fiction • Temps de lecture : 3 minutes
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Des couleurs vives. Des sons riches. Des décors flamboyants. Il court. Se retourne. Échappe à ses étranges poursuivants non pas fait de chair et de sang mais d’ombre et de fumée. Il sait que quelque chose ne tourne pas rond. Il le sent au plus profond de son être. La forêt semble être en mouvement tout autour de lui. Mais il court. Il ne doit pas s’arrêter sinon, qui sait ce que ces créatures cauchemardesques lui feront.

La réalité fluctue. Ses sens le trompent. Mais la menace est toujours là. Dans un énorme bâtiment abandonné aux airs post apocalyptique, il s’arrête. Non ! Tout cela n’est pas réel !

Plus rien. Où sont passées les créatures ? Il regarde autour de lui. Une lumière semble l’inviter à franchir une porte. Vers où mène t-elle ? Il la franchit. C’est un nouveau décor. Un champ de colza. Le jaune éclatant des fleurs font miroiter le soleil. Il se trouve au milieu. Respirant cet air pur. Soudain, ses pieds abandonnent le doux contact avec la Terre. Il lévite lentement, s’élevant de plus en plus haut en direction des nuages. Le sourire au lèvre, il comprend tout. Mais quelle est cette étrange musique rock résonnant dans toute la vallée. Charmante au début, elle devient de plus en plus agaçante. De plus en plus fort aussi. Quand soudain, il sent que son envol s’arrête. Comme Icare, il est allé trop haut. Le soleil ne veut pas de lui. C’est la chute. Le sol se rapproche. Bam !

Bernard se réveille en sursaut. Il se trouve dans sa chambre, les volets fermés. Son radio-réveil diffuse une musique rock. En reprenant son souffle, il affiche un sourire qui s’agrandit jusqu’à atteindre ses oreilles. Il exulte soudainement :
– YEEESSSSS !!!!

Il se lève et enfile un peignoir en dansant. Pris par une immense joie, il chantonne :
– Je l’ai fait !!! Je l’ai fait !!! ça y est !!!

Bernard prend son téléphone portable et compose un numéro. Une femme répond :
– J’espère que tu m’appelles pour m’annoncer une bonne nouvelle !
– YESSSSSS !!!! C’est bon ! répond Bernard
– Tu l’as fait ? Vraiment ?
– Oui madame ! Pas plus tard qu’à l’instant !
– ça donne quoi alors ?
– Attend un peu, là c’est tout frais !
– Je vois, tu dois être soulagé ?
– Soulagé ! Pas qu’un peu ! ça fait plus d’un mois que je dors 15h sur 24h pour arriver au résultat final.
– Okay génial ! vraiment gé-ni-al !
– Bon je te laisse, j’ai du boulot !
– Oui oui bien sûr, vas-y l’artiste ! épate moi ! Encore bravo Bernard.

Bernard raccroche. Après un petit silence à apprécier son succès, il quitte la chambre avec précipitation. Il descend les marches menant vers la cave et ouvre la porte.
Une vraie caverne d’Ali Baba technologique l’attend. Plusieurs écrans d’ordinateur de toutes les tailles, des disques durs, portables, lecteurs en tout genre et autres appareils n’ayant pas encore de définition.

Il s’approche d’une petite glace et regarde le haut de son crâne dans le reflet comme à la recherche de quelque chose. Il tâtonne avec ses doigts pendant plusieurs secondes quand finalement, il trouve. Avec un petit geste délicat, il retire un implant pas plus gros qu’un grain de riz.
– Mon petit, toi tu n’imagine pas ton importance ! dit t-il avec légèreté.

Derrière son bureau, Bernard se met au travail. Il place le petit implant dans un lecteur spécialisé. Sur l’écran, un processus de transfert de donnée est en cours. Une fois fini, Bernard exécute quelques commandes et se retrouve sur une interface ressemblant à un logiciel de montage vidéo. En bougeant simplement ses mains devant l’écran, il place des éléments, les assemble et les images s’affichent. Ce sont celle de son rêve. Le bâtiment abandonné, le champ de colza, son escapade en apesanteur.

Son téléphone sonne et affiche le nom de l’interlocuteur : Producteur.
Il décroche. “Alors l’artiste ? ça donne quoi ?” demande la même femme que précédemment
– Un petit peu de réarrangement. Faut que je supprime le début, je le garde pour un projet d’horreur. On verra. Je me concentre surtout sur la beauté du vol. C’est de la pure création en rêve lucide, répond Bernard.
– D’accord, t’as une totale liberté créative sur ce projet ! N’oublie pas que c’est une innovation sans précédent ! La naissance d’un nouvel Art ! Je vais organiser une avant-première mondiale. Attend toi à être célèbre !
– C’est l’Art qui m’importe.
– Bien sur, l’Art. La priorité je comprend. On verra quand tu auras tous les grands studio à tes pieds pour faire suites, remakes, reboots et copies.

Bernard fait virevolter ses mains dans tous les sens et finalement, donne un petit coup de doigt pour valider. Après un petit silence, il annonce :
– ça y est. Le film est complet.

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