Le tourisme responsable

Tout public Fiction • Temps de lecture : 4 minutes
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Ce matin, j’avais rendez-vous avec Jonas, un ami de longue date. Il revenait de 4 semaines de voyage en Nouvelle-Zélande, et j’avais vraiment hâte qu’il me raconte ses aventures en détail. Nous avions convenu d’une petite randonnée autour de son village, comme à l’accoutumée, mais le temps pluvieux ne me motivait pas vraiment.

_ Tu veux boire qqch? me demanda Jonas.

_ Non, merci, je suis prêt à partir, même si je t’avoue que vu le temps dehors, je ne suis plus vraiment sûr de vouloir sortir.

_ Ah! Ne t’inquiètes pas, il ne pleut pas là où je t’emmène, s’exclama Jonas.

Quelque peu surpris par sa réponse, je regarda alors dehors pour vérifier le temps. La pluie semblait s’être intensifiée depuis mon arrivée. Jonas me fît signe de la main pour que je le rejoigne au sous-sol. Il m’ouvrit la porte et me laissa entrer en premier.  Les quatre murs de la pièce étaient peint en vert, ainsi que le plafond et le sol. A ma droite, dans un petit renfoncement, se tenait un ordinateur, avec quelques gadgets posés ça et là. Quant à l’étrange objet au milieu de la pièce, cela ressemblait à un appareil de musculation.

_ Aller, installe toi vers le marcheur, me demanda-t-il en pointant du doigt l’appareil au centre.

Je savais Jonas un peu bizarre mais je ne voyais pas vraiment où il voulait en venir. Il paraissait sûr de soi, et ne me laissait pas vraiment le choix.

_ Tiens ça un instant, veux-tu.

Il me tendit un genre de casque de moto de couleur noire et sans visière. Des petites caméras placées judicieusement au niveau des yeux donnaient à ce casque une allure de robot venu d’une autre époque.

_ Ca ressemble à un Oculus Rift ou un truc du genre, dis-je.

_ Bien vu, c’est relativement la même chose mais en très haute définition, et avec un son 3D incorporé. On en a au boulot, ils ne sont pas encore commercialisés. Tu vas voir, c’est d’enfer!

_ Tu veux dire que je vais mettre ça? Pour quoi faire?

_ Pour partir en randonnée pardi! Tu m’as toujours dit que tu voulais aller au Mont Cook en Nouvelle-Zélande. Alors voilà, je t’y emmène, et gratuitement.

Je restais bouche bée face à l’enthousiasme de Jonas. Il paraissait excité comme un gamin qui avait hâte de montrer ses nouveaux jouets mais cachait sa joie par un petit sourire malicieux.

_ Je développe une simulation ultra réaliste pour permettre aux gens de voyager sans bouger de chez eux, ou presque.

Décidément, Jonas était encore plus fou que je ne le croyais.

_ Quel intérêt? lui demandais-je sans réfléchir.

_Tu vas comprendre, vas-y c’est prêt. Monte sur le marcheur, attaches-y tes pieds avec les sangles, enfile le casque et patiente une petite minute le temps que je charge le tout.

Je m’exécutais.

_ Aller c’est parti pour 5 minutes de marche!

Tout était noir. Je n’entendais plus rien. Je perdais un peu l’équilibre du fait de l’absence de point de repère, jusqu’à ce que tout à coup, une image apparaisse suivie par un piaillement d’oiseau. Je sentais un air frais qui me caressait le visage et les mains. J’avais même l’impression que l’odeur avait changé. Mais le plus fou, c’est que tout ce que je voyais paraissait réaliste, vraiment réaliste! J’étais là, au beau milieu de la nature. Seul un petit chemin de terre se glissait entre les hautes herbes et les cailloux, pointant vers les montagnes qui me faisaient face. Je pouvais bouger mes bras, je les voyais comme s’ils étaient vrais. Mon tatouage sur l’avant bras était là, ma bague également, les habits que je portais… C’était comme si mon image avait été transportée dans un univers parallèle. Je me sentais privilégié de me trouver dans un endroit aussi agréable, et un sentiment intense de liberté me fit soudain frissonner. Je pouvais voir mes poils s’hérisser! Comment était-ce possible de vivre ça, j’avais l’impression d’avoir été réellement téléporté sur une autre planète. Ni une ni deux, je voulu avancer dans ce décors de rêve. J’arrivais à marcher, mais la sensation n’était pas parfaitement naturelle. Mais ça fonctionnait, ça fonctionnait même très bien! Je partis alors à la découverte de ce monde, émerveillé par tout ce que je voyais et entendais. Certains sifflements d’oiseaux ne m’étaient pas familier, j’arrivais à les repérer dans les arbustes sur ma droite. Je continua ma route, puis, après une centaine de pas, tout s’éteignit brutalement et je repris conscience de la réalité. Je n’avais jamais vécu une telle expérience. Un peu déboussolé, je décida d’enlever le casque et je me tourna vers Jonas qui s’avançait vers moi. Il ne paraissait pas surpris de me voir dans cet état et attendait mes impressions avec un sourire jusqu’aux oreilles.

_ Jonas, c’est… Je ne sais pas quoi dire, c’est fascinant ! C’est tellement immersif !

_ J’étais sûr que ça allait te plaire. Malgré que tout ne soit pas encore parfait, je devrais pouvoir améliorer encore pas mal de petites choses pour que ça ressemble à une vraie randonnée. Fini les touristes qui hurlent, fini les déchets dans des lieux paradisiaques, fini les dangers! J’ai même recréé un chemin naturel en terre par ordinateur au lieu du gros chemin en gravier pour une immersion plus envoutante. Il n’y a plus que toi dans la nature, tu te libères complètement et tu peux te ressourcer gratuitement. Alors pour l’instant, il n’est pas possible de s’éloigner du chemin, il faudrait quadriller la zone avec des cameras 360°, ce que je n’ai pas pu faire pendant mon voyage. Mais imagines, tu pourrais escalader l’Everest, traverser le désert du Sahara, te balader dans la jungle tropicale! Il suffit de faire varier l’humidité de la pièce, régler le taux d’oxygène, la température, faire varier la puissance des ventilateur, ajouter de la pluie, différentes odeurs… D’ailleurs tu as du sentir le vent et quelques odeurs pendant ta simulation. Les possibilités sont quasiment infinies, à l’exception de toucher les objets, mais je trouve que la présence des caméras sur le casque te permettant de voir ton corps réel dans la simulation apporte beaucoup de réalisme, d’où les murs peints en vert. En plus de ça, on réduit la pollution des avions en minimisant le nombre de vols, on permet à tout le monde voyager là où ils veulent, avec le choix de la météo. Que ce soit pour se détendre ou faire un peu de sport, cette simulation apporterait une bouffée d’air frais, et protègerait grandement la planète. On pourrait avoir des salles de simulation en ville, payer un abonnement pour y aller quand on le souhaite, tu t’imagines?

Je restais sans rien dire. En fait, je ne savais pas trop quoi penser de tout ça. Une chose est sûre, c’est que je n’avais plus envie d’aller me balader dans le bois d’à côté, je voulais repartir loin d’ici.

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